Les déterminants sociaux de la santé (DSS) sont la myriade de facteurs non médicaux qui influencent les résultats en matière de santé. Il s’agit notamment des variables environnementales, sociales et économiques dans lesquelles les individus naissent, grandissent, travaillent, vivent et vieillissent, ainsi que de l’ensemble plus large des forces et systèmes qui façonnent les conditions de la vie quotidienne.
La recherche montre que ces déterminants sociaux peuvent avoir une influence plus importante sur la santé que les soins de santé ou les choix de mode de vie. Par exemple, de nombreuses études suggèrent que les DSS sont responsables de 30 à 50 % des problèmes de santé. Les estimations montrent en outre que le poids des secteurs extérieurs à la santé dans les résultats sanitaires de la population excède celui du secteur de la santé.5,6,7 Par conséquent, il est fondamental de comprendre et d’aborder les DSS avec pertinence afin d’améliorer les résultats de santé et cela peut être un outil utile dans la gestion des sinistres incapacité/invalidité, en particulier pour les sinistres liés à la santé mentale.
Les DSS sont classés en cinq catégories :
- Stabilité économique
- Accès et qualité de l’éducation
- Accès et qualité des soins
- Quartier et environnement
- Contexte social et communautaire
Quel est l’impact du changement climatique sur la santé mentale ?
Le changement climatique a un impact sur les cinq catégories de DSS mentionnées, soit : (i) par l’impact direct des événements climatiques extrêmes, soit (ii) par l’impact secondaire d’autres maladies liées à l’environnement, soit (iii) en raison de son impact sur les systèmes sociaux et économiques.
Impact direct des phénomènes météorologiques extrêmes
Les experts climatiques affirment que le changement climatique influence les phénomènes météorologiques violents tels que les inondations, les sécheresses, les ouragans et les incendies de forêt en provoquant des sécheresses plus longues et des températures plus élevées dans certaines régions et des déluges plus intenses dans d’autres. De tels événements météorologiques extrêmes deviennent non seulement plus fréquents mais aussi plus graves.
Selon une étude publiée dans The Lancet, le nombre de personnes exposées à des phénomènes météorologiques extrêmes au cours du siècle prochain sera beaucoup plus élevé qu’on ne le pensait : « un risque potentiellement catastrophique pour la santé humaine » qui pourrait réduire à néant 50 ans de progrès en matière de santé mondiale.8
Les personnes qui vivent ces événements subissent de nombreux facteurs de stress, y compris la perte d’êtres chers, le fait d’être témoins de traumatismes physiques et émotionnels, et le déplacement hors de leur domicile, entre autres. L’impact psychologique de tels événements peut être profond et mener à des problèmes de santé mentale aigus et chroniques. Les personnes risquent davantage de se sentir vulnérables, impuissantes et sans espoir, ce qui peut entraîner une augmentation des problèmes de santé mentale tels que l’anxiété, la dépression et le syndrome de stress post‑traumatique.9,10
Les phénomènes météorologiques extrêmes ont également été associés à une augmentation des comportements agressifs et de la violence familiale. L’exposition à une chaleur extrême peut entraîner une consommation accrue d’alcool pour composer avec le stress, une augmentation des admissions à l’hôpital et aux urgences pour les personnes atteintes de troubles mentaux ou psychiatriques et une augmentation du nombre de suicides.11
Pour certains, le simple fait de lire ces événements peut conduire à des sentiments de désespoir, de détresse et à une perception accrue du stress quotidien.12
La gravité et la fréquence croissantes de ces phénomènes météorologiques graves exercent une pression supplémentaire sur les services de santé mentale qui, dans de nombreux pays, manquent de ressources et de financement. En même temps, il y a souvent une interruption ou une diminution de la disponibilité de ces services. Les personnes qui vivent dans les régions les plus touchées par le changement climatique sont souvent les plus vulnérables, et elles n’ont peut-être pas accès aux ressources dont elles ont besoin pour faire face aux répercussions du changement climatique sur la santé mentale.
Les premiers intervenants, secouristes et autres personnes impliquées dans les interventions en cas de catastrophes liées à des conditions météorologiques extrêmes courent également un risque accru de souffrir de troubles mentaux à court et à long terme.13
L’intervention précoce est essentielle, et les assureurs peuvent jouer un rôle précieux en informant les assurés de toute offre de service de santé mentale et/ou de bien-être proposée grâce à leurs prestations. En veillant à ce que ces services soient fournis de manière adéquate et en temps voulu, les assureurs peuvent apporter une valeur ajoutée en comblant le fossé créé par les longues listes d’attente et les délais des systèmes de santé publics.
Impact secondaire lié à d’autres problèmes de santé
Le changement climatique et les circonstances qui l’exacerbent créent des conditions environnementales malsaines, ce qui a des répercussions sur presque tous les domaines de la santé. Les maladies non transmissibles sont particulièrement touchées, notamment les cardiopathies ischémiques, les maladies respiratoires chroniques et les cancers. Les blessures, les infections respiratoires et les accidents vasculaires cérébraux suivent de près.
Par exemple, l’augmentation de la pollution atmosphérique due à la combustion de combustibles fossiles contribue aux problèmes respiratoires, aux maladies cardiaques et aux accidents vasculaires cérébraux. L’augmentation des vagues de chaleur peut se traduire par un allongement de la saison des allergies et une augmentation des maladies respiratoires, tandis que l’augmentation des pluies favorise l’apparition de moisissures, de champignons, de polluants et d’agents pathogènes dans l’air intérieur. Des études ont même montré que l’exposition à long terme à la pollution atmosphérique est associée à un déclin de la fonction cognitive.14,15
Il existe une relation connue entre notre santé physique et mentale et ces problèmes de santé physique peuvent, à leur tour, mener à des problèmes de santé mentale comme l’anxiété et la dépression. Il est prouvé que les troubles mentaux tels que la dépression, l’anxiété et le stress post-traumatique peuvent se développer après d’autres pathologies, notamment l’insuffisance cardiaque, l’accident vasculaire cérébral et l’infarctus du myocarde. Ces troubles peuvent être provoqués par des facteurs incluant la douleur, la peur de la mort ou du handicap, et les difficultés financières engendrées par l’événement.16
Un mauvais environnement de travail constitue également un risque pour la santé mentale.17,18 Par conséquent, des risques professionnels accrus, tels que le risque d’insolation et l’exposition à long terme à la pollution sur le lieu de travail, peuvent contribuer à accroître la perception du stress au travail, qui est un facteur de risque connu d’épuisement professionnel et de détérioration de la santé mentale. Les assureurs, particulièrement ceux qui offrent des garanties santé et incapacité/invalidité ainsi que des prestations aux salariés, peuvent influencer l’environnement de travail en sensibilisant les souscripteurs des contrats à la santé et à la sécurité et en mettant en évidence l’intérêt d’investir dans des programmes de bien‑être.
Impact sur les systèmes sociaux et économiques
Des systèmes sociaux et une sécurité économique de qualité sont connus pour favoriser la résilience aux troubles de la santé mentale. Par exemple, une bonne alimentation a un impact positif sur la santé globale, y compris la santé mentale. Inversement, une mauvaise alimentation et une insécurité alimentaire augmentent le risque de problèmes de santé mentale et même de développement de troubles psychiatriques. Les changements dans les modèles météorologiques peuvent causer des perturbations dans l’agriculture, entraînant des pénuries alimentaires et des hausses de prix. Les personnes souffrant d’insécurité alimentaire sont plus susceptibles de souffrir d’anxiété, de dépression et d’autres problèmes de santé mentale.19,20,21
Il est établi que l’accès aux espaces verts a un effet bénéfique sur le bien-être physique et mental au travers de l’accès physique et de l’utilisation de ces espaces. Le changement climatique entraîne un déclin de la diversité des espèces végétales et animales. De nombreuses personnes ont un lien profond avec la nature et éprouvent un sentiment de perte lorsqu’elles constatent la destruction d’écosystèmes et la disparition d’espèces. Par conséquent, en plus de réduire l’accès aux espaces verts pour l’exercice physique et la détente, la destruction de l’environnement naturel peut entraîner des sentiments de tristesse, de chagrin, de désespoir et de perte.22,23
Le changement climatique peut exacerber les inégalités sociales, ce qui peut conduire à des problèmes de santé mentale comme le stress, l’anxiété et la dépression. Par exemple, les personnes qui vivent dans des régions à faible revenu peuvent être plus exposées aux risques environnementaux et moins résistantes économiquement aux événements mentionnés ci‑dessus, ce qui peut aggraver encore les problèmes de santé mentale. Les assureurs jouent un rôle précieux parmi les filets de sécurité sociale en protégeant la stabilité financière des assurés en cas de besoin.
Conclusion
L’impact du changement climatique sur la santé mentale s’avère complexe et multidimensionnel. Il existe plusieurs mécanismes potentiels par lesquels le changement climatique peut affecter la santé mentale et cet impact risque d’être plus important pour les personnes qui sont déjà vulnérables aux problèmes de santé mentale, comme celles qui souffrent de troubles mentaux préexistants, les populations à faible revenu et les communautés marginalisées.
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